Je ne suis pas Antillaise !
Récemment, j’ai commencé à réfléchir un peu plus sur l’identité et à me demander pourquoi elle affecte les comportements des individus.
Quand j’ai pensé à la Martinique, je me suis rendue compte de suite que même s’il y a pas mal de similitudes, les cultures et les histoires des deux îles (Sainte-Lucie et la Martinique) sont en fait vraiment différentes.
Bien entendu, en tant que femme Sainte-Lucienne, il y a quelques aspects de la vie martiniquaise que je ne comprendrai jamais.
C’est la raison pour laquelle j’en ai marre d’expliquer les différences entre nos cultures, politiques, langues et sociétés aux métros qui s'écrient : « Mais c'est la même chose ! » quand j’explique qu’en fait, je suis Caribéenne et pas Antillaise.
Mais, avant de même essayer d’expliquer les différences entre un antillais et un caribéen, il faut parler un peu du colonialisme britannique et français.
Colonialisme
Après avoir régné sur des territoires tout autour du monde pendant l’esclavage, la France a décidé de les appeler les DOM/TOM ou les COM en lieu et place des colonies.
Par conséquent, bien que la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, Mayotte et la Réunion ne font pas partie de la France métropolitaine, leurs résidents ont la nationalité française et « bénéficient » des mêmes privilèges que les résidents de l’hexagone.
Par contre, la majorité des anciens territoires britanniques sont indépendants, sauf les BOT (territoires britanniques d'outre-mer). Cependant, contrairement aux résidents DOM/TOM, les résidents BOT n’ont pas forcément la nationalité britannique.
Par conséquent, la majorité des anciennes colonies britanniques dans la Caraïbe sont États-nations indépendants même s’il y en a pas mal qui sont membres du Commonwealth. C’est-à-dire que la Reine d’Angleterre est chef d'État et que ces pays adhèrent aux lois britanniques archaïques.
Mais il y a quoi d’autre qui nous sépare ?
Culturellement, tous les dimanches matins j’ai écouté 'I Didn't Jump the Fence' de Red Sovine comme un enfant à Sainte-Lucie. Cependant, à la Martinique, j’ai écouté la musique de Kassav.
De plus, la majorité des Antillais adorent marcher. Je n’arrive même pas à compter le nombre d’invitations que j’ai reçu (et ai refusé) à la Martinique. Il y a de nombreux collègues qui m’ont invité le dimanche à 6 heures du matin chez eux afin d’effectuer une randonnée (durée : 2 à 4 heures !).
Et quand on parle du carnaval, j’étais choquée de voir les Martiniquais déguisés en tenue infirmière sexy et en talons avec une paire de bas résille pendant le Mardi Gras et les différentes soirées carnavalesques. Il va sans dire que je n’ai jamais vu rien de pareil à Sainte-Lucie.
Quand il s’agit de la cuisine, on mange beaucoup les mêmes tubercules, prépare du vivaneau de la même façon au déjeuner et dévore des accras de morue comme si c’était la fin du monde. Cependant, il y a des influences françaises incorporées dans la cuisine antillaise, tandis que dans la Caraïbe anglophone, il y a un mélange de plats britanniques et américains.
Linguistiquement, on ne parle pas les mêmes langues européennes. Les Antillais parlent et apprennent le français à l’école et les Caribéens parlent anglais. Cependant, les gens de Sainte-Lucie, la Dominique, Haïti, la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane, et Saint Martin parlent tous un créole francophone. Pourtant, j’ai vite découvert que chaque territoire possède ses propres accents, vocabulaires, gestes, stresses et même son propre moment pour parler son créole.
En effet, à Sainte-Lucie il y a une journée entière dédiée à notre héritage créole qui s’appelle Jounen Kwéyòl. Un aspect culturel que beaucoup de mes collègues Antillais trouvent fascinant comme il est normal de parler en créole tous les jours.
Même si vous considérez que ces différences sont minuscules et inutiles, pour les résidents de ces îles, cela représente son unicité, sa culture et son histoire. C’est incroyable qu’il n’y ait qu’une distance de 15 minutes en avion entre Sainte-Lucie et la Martinique, mais que ces deux îles sont complètement différentes.
C’est la raison pour laquelle j’essaie de partir du principe que je ne connais pas le pays ou la culture des autres, surtout quand je leur parle pour la première fois. Ecouter les détails sur la culture et l’histoire d’un pays étranger de la part d’un local est toujours plus profond.
Comme je continue à réfléchir sur de nombreux aspects de mon identité (qui m’influencent), j’espère que lire cet article vous donnera envie de discuter de manière respectueuse avec des individus qui sont socialement, économiquement, physiquement, émotionnellement, culturellement, racialement, sexuellement, géographiquement et politiquement différents de vous au lieu de supposer connaître et comprendre leurs vies et expériences.